Thursday, March 17, 2011

Ces enfants étrangers dont Israël ne veut pas-Strangers no more : AL-Aoufok


La petite Esther est soulagée. Elle a un sursis. Israël a décidé de reporter, jusqu’à la fin de l’année scolaire, son expulsion du pays et celle de 399 autres enfants de travailleurs étrangers. Il faut dire que le documentaire dont elle est l’une des vedettes a obtenu un Oscar à Hollywood. Strangers no more de Karen Goodman et Kirk Simon montre la vie quotidienne à l’école Bialik-Rogozin de Tel-Aviv, un établissement qui reçoit les enfants de travailleurs immigrés et réfugiés africains à partir de la maternelle.

À l’annonce de la récompense américaine, les politiques et le public israélien ont applaudi à tout rompre, comme s’il s’agissait d’un produit made in Israël. Ils oubliaient au passage l’annonce de l’été dernier par le ministère de l’Intérieur des ordres d’expulsion émis à l’encontre de centaines d’enfants de travailleurs étrangers et de leurs parents, dont 120 écoliers de Bialik-Rogozin.

Ironie de l’histoire : le jour même de l’Oscar, la presse israélienne annonçait la mise en place à l’aéroport international Ben-Gourion, près de Tel-Aviv, d’un centre de rétention où les enfants en cours d’expulsion seraient détenus jusqu’à leur montée dans l’avion. En dépit des murs décorés avec les personnages préférés des petits et des salles de jeux, c’est une prison qui a commencé à fonctionner. Ainsi, après leur arrestation, le week-end dernier, une Nigériane et sa fille de six mois y ont été enfermées. Soixante-douze heures après, elles étaient mises de force dans un avion. Direction : le Niger.

Selon les estimations officielles, il y aurait en Israël entre 250 000 et 400 000 travailleurs étrangers. La moitié d’entre eux seraient des clandestins, menacés d’être à tout moment arrêtés et renvoyés dans leur pays d’origine. Même chose pour leurs enfants, qu’ils soient nés en Israël ou parlent couramment l’hébreu. Pour ne pas être expulsés, ils doivent être depuis plus de cinq ans dans le pays et intégrés au système scolaire public, et ceci, à partir du cours préparatoire. Six cents d’entre eux rentrent dans ces critères. Restent 500 à 600 autres enfants - moins de cinq ans en Israël ou pas encore scolarisés -, dont les 400 qui viennent de bénéficier d’un sursis jusqu’à l’été prochain.

Mais la menace se vit au quotidien. "Hallucinant, ignoble, en violation totale de la convention internationale sur les droits de l’enfant dont Israël est signataire." De l’Unicef-Israël aux associations locales d’aide aux sans-papiers, on n’a pas de mot pour qualifier les situations inextricables dans lesquelles se débattent des tas de familles. Exemple : Rachel, venue des Philippines en février 2002. Après la mort de la vieille dame dont elle s’occupait en 2007, elle a perdu son visa de travail.

Aujourd’hui, elle a deux enfants, nés en Israël, Eilon, 5 ans et demi, et Maria, 2 ans. Eilon fait partie des 400 dont l’expulsion a été reportée jusqu’à l’été. La petite Maria et sa maman sont, elles, "expulsables" à tout moment.